L’intérim logistique en chute libre, comment les entreprises et les intérimaires peuvent rebondir
- Emma Casanova
- 12 sept.
- 4 min de lecture
Qui aurait cru que ça finirait par arriver ? Après les années folles postCovid,
marquées par une explosion du ecommerce, le secteur de l’intérim logistique connaît
un sérieux coup de frein. Selon Prism’Emploi, l’emploi intérimaire a reculé de – 20 %
en équivalent temps plein fin 2024, avec des conséquences immédiates dans les
entrepôts, les hubs logistiques et le transport routier.
Mais derrière les chiffres bruts, il y a des réalités humaines et économiques à
décortiquer. Pourquoi ce recul ? Quels sont les impacts pour les entreprises et les
intérimaires ? Et surtout, quelles stratégies peuvent permettre de rebondir ? Cet
article fait le point sur une mutation inattendue mais riche d’enseignements.
Les chiffres de l’intérim en baisse : comprendre l’onde de choc
Les derniers chiffres disponibles de Prism’Emploi et de la Dares (Direction de
l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques, rattachée au Ministère
du Travail) sont sans appel : le nombre de contrats intérimaires a chuté d’environ
20 à 23 % en un an dans le secteur logistique.
Une tendance qui s’est accélérée au second semestre 2024, touchant principalement :
Les missions courtes (moins d’un mois), souvent liées aux pics saisonniers,
Le ecommerce, qui a connu un ralentissement postinflation,
Les postes de transport, notamment en livraison du dernier kilomètre.
En cause ? Un cocktail explosif, ralentissement économique global, inflation qui
réduit la consommation, réorganisations internes (réduction des stocks,
automatisation des process), anticipation des coûts salariaux. Sans oublier l’impact
de la robotisation, qui remplace peu à peu certaines tâches simples de picking ou de
tri.
Le plus frappant, c’est que cette baisse arrive après une période de surchauffe.
Beaucoup d’entreprises s’étaient habituées à une flexibilité quasi infinie grâce à
l’intérim et se retrouvent aujourd’hui à devoir repenser leur modèle.
Intérim en berne, gestion de crise ou adaptation structurelle ?
Pour les entreprises clientes, la baisse du recours à l’intérim n’est pas seulement un
ajustement conjoncturel, c’est aussi un signal plus profond. Certaines ont choisi de
réduire leur dépendance à l’intérim pour absorber les coûts liés à l’énergie et au
transport, lisser les variations d’activité en développant le polyvalence interne et, pour
certaines, investir dans l’automatisation (robots de picking, convoyeurs intelligents,
systèmes WMS avancés).
Mais cette réorganisation a aussi ses revers. Beaucoup témoignent d’une surcharge
des équipes fixes, avec des managers épuisés à force de jongler avec des plannings
tendus. La baisse de flexibilité entraîne une montée des tensions sociales, des
retards de production, voire des pertes de contrats.
Un grand logisticien de la région lyonnaise qui a réduit de 30 % ses effectifs
intérimaires début 2024, a vu sa productivité chuter de 15 % sur certains créneaux.
“On pensait absorber le choc en demandant un effort ponctuel à nos équipes, mais
l’effet domino a été sous-estimé”, confie son DRH.
Côté intérimaires, précarité ou opportunité ?
Pour les intérimaires, la baisse d’activité se traduit par moins d’heures, moins de
revenus et donc plus d’incertitude. Nombreux sont ceux qui jonglaient déjà entre
plusieurs agences pour assurer une certaine stabilité. Aujourd’hui, certains doivent
accepter des missions plus éloignées géographiquement, des horaires moins
attractifs, voire changer temporairement de secteur d’activité.
Mais tous ne subissent pas. Une partie des intérimaires y voit une occasion de
monter en compétences et de se rendre plus attractifs sur le marché. Formation
CACES pour élargir les postes accessibles, certification WMS pour piloter les outils
digitaux, ou encore orientation vers la maintenance de premier niveau sur les lignes
automatisées.
“Avant, je faisais exclusivement du picking. Quand les missions ont ralenti, mon
agence m’a proposé une formation au CACES R489. Résultat, j’ai pu enchaîner sur
des postes de cariste, mieux payés et plus durables”, explique Karim, intérimaire à
Saint Ouen l’Aumône pour Abn. Recrutement.
Baisse du recours à l’intérim, quels leviers pour rebondir ?
Face à cette mutation, plusieurs leviers s’offrent aux entreprises et aux intérimaires.
Pour les entreprises
Fidéliser les meilleurs intérimaires. Au lieu de voir l’intérim comme une main-
d’œuvre jetable, miser sur les profils fiables, proposer des perspectives (CDI,
évolutions, formations).
Anticiper les besoins en construisant avec les agences intérims locales des pools
de talents formés en amont, pour éviter les recrutements d’urgence.
Travailler main dans la main avec les agences intérims locales effectuant des
briefings réguliers, en alignant enjeux RH et enjeux économiques.
Pour les intérimaires
Se former en utilisant les heures CPF, demander des montées en compétences sur
des machines spécifiques, élargir ses certifications.
Diversifier ses missions en acceptant des secteurs voisins (logistique
agroalimentaire, santé, industrie) moins touchés.
Être mobile et envisager les déplacements plus longs ou le travail en équipe pour
maximiser les opportunités.
Et demain ? Quelles perspectives 2025–2026 pour les agences intérims ?
La situation est-elle vouée à durer ? Pas forcément. Plusieurs signaux laissent
penser que 2025 pourrait marquer une reprise, notamment grâce à :
La relance du ecommerce, avec des modèles plus durables (livraison verte,
circuits courts)
Les besoins en logistique liée à la santé et au secteur agroalimentaire qui ont le
vent en poupe
Les investissements massifs dans les infrastructures portuaires, ferroviaires et
aéroportuaires
Mais le modèle intérimaire évolue. On voit émerger de nouvelles pratiques liées à
l’automatisation des tâches simples renforçant les besoins en profils plus qualifiés.
En clair, l’intérim ne disparaît pas, il se transforme. Ceux qui s’adapteront en sortiront
renforcés. C’est le cas d’Abn. Recrutement qui a compris les enjeux d’une logistique
plus qualifiée, plus durable et plus connectée.
CONCLUSION
La baisse actuelle de l’intérim logistique est un électrochoc pour tout l’écosystème.
Mais plutôt que d’y voir un effondrement, mieux vaut la considérer comme une
opportunité de réinvention. Pour les entreprises, c’est l’occasion de réfléchir à une
stratégie RH plus durable et qualitative. Pour les intérimaires, c’est le moment de
devenir acteurs de leur parcours, en misant sur la polyvalence et la formation.
Et comme on dit souvent en logistique : ce n’est pas la charge qui compte, c’est
comment on l’équilibre.
Sources
Prism’Emploi, Bilan intérim 2024
Dares, Emploi intérimaire secteur logistique 2024
Voxlog, Tendances transport et supply chain
Témoignages internes ABN Recrutement





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